Le 16 mai 1871, les insurgés de la Commune
mettent à terre la colonne Vendôme, symbole du pouvoir et des guerres surmontée d'une statue de Napoléon. Sans que les choses soient parfaitement éclaircies, le peintre Gustave Courbet, qui avait prôné cet acte révolutionnaire, est suffisamment impliqué pour avoir ensuite à payer toute sa vie pour la restauration du monument.
La chute de la colonne Vendôme est un des premiers événements politiques à avoir été photographié de façon séquentielle, sous une forme qui anticipe d'assez près de ce que fera un peu plus tard le cinéma. Au fil des étapes de la mise à terre, les Communards posent fièrement auprès du monument en cours de déboulonnage...sur des images qui serviront ensuite à les faire arrêter
En mai 1873, le nouveau président de la République, le maréchal Mac-Mahon, décide de faire reconstruire la colonne Vendôme aux frais de Courbet. Le peintre est acculé à la ruine, ses biens mis sous séquestre, ses toiles confisquées. Il s'exile en Suisse et obtient de payer près de 10 000 francs par an pendant 33 ans, mais meurt avant d'avoir payé la première traite.
Marx dans sa préface à la réédition du 18-Brumaire de Louis Bonaparte... en 1869 avait écrit: Lorsque le manteau impérial tombera sur les épaules de Louis-Bonaparte, la statue d’airain de Napoléon s’écroulera du haut de la colonne Vendôme.

Triomphe de la marchandise
Le joailler Lorenz B., installé place Vendôme depuis près de quinze ans, est devenu un grand collectionneur de photographies. De ses salons on aperçoit le Ritz et la fameuse colonne de bronze susnommée. Ce spectacle quotidien symbolise à ses yeux son appartenance au cercle choisi des Van Cleef et Arpels, Cartier et Chanel de la place Vendôme. Collectionneur dans l'âme, la première photographie qui retient son attention est une image ancienne de barricades rue de la Paix, prise le jour de la mise à terre de la colonne Vendôme. Lorenz B., qui ne connaît pas alors l'histoire de la Commune, est touché de voir à terre, à l'époque des calèches, le monument qu'il regarde tous les jours depuis ses fenêtres comme l'axe parisien du luxe. Il achète l'image, il se documente, trouve d'autres clichés. Son attention au fil de la quête se fixe sur la représentation de cette colonne qui est au centre de son champ visuel. Il en illustre dans ses salons l'histoire en photographies, avec l'image quelques années après la Commune du contremaître posant fièrement auprès de la colonne en reconstruction, jusqu'à une vue en contreplongée prise depuis son bureau et commandée à un photographe à la mode. Ces tirages sont comme des trophées qui me racontent tout ce qui s'est passé en ce lieu, déclare le joaillier. Ce qui m'intéresse c'est la chasse, la chasse aux oeuvres.

Rilke, 16 mai 1911, lettre à Marie de la Tour et Taxis
Ne faudrait-il pas imaginer quelque grotesque personnage, à seule fin d’appliquer cette phrase: “Il passa les sept dernières années de sa vie à fermer une boutonnière qui ne cessait de s’ouvrir."

Place Vendôme

À la Saint-Honoré,
S'il fait gelée,
Le vin diminue de moitié.