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Représentez-vous donc l’univers comme un grand animal ; que les étoiles qui sont des mondes sont dans ce grand animal comme d’autres grands animaux qui servent réciproquement de mondes à d’autres peuples, tels que nous, nos chevaux, etc., et que nous, à notre tour, sommes aussi des mondes à l’égard de certains animaux encore plus petits sans comparaison que nous, comme sont certains vers, des poux, des cirons ; que ceux-ci sont la terre d’autres plus imperceptibles ; qu’ainsi de même que nous paraissons chacun en particulier un grand monde à ce petit peuple, peut-être que notre chair, notre sang, nos esprits, ne sont autre chose qu’une tissure de petits animaux qui s’entretiennent, nous prêtent mouvement par le leur, et se laissant aveuglément conduire à notre volonté qui leur sert de cocher, nous conduisent nous-mêmes, et produisent tous ensemble cette action que nous appelons la Vie.''

Tandis que nos collaborateurs cheminent en direction de la Cour du roi Arthur pour le grand festin qui les attend en ce jour de Pentecôte, rappelons à nos lecteurs le conte du Manchon en peau de chien, qui n’est pas sans évoquer les dernières aventures de notre Fantômette. La table est dressée, des cuisines du château montent les meilleures odeurs de poissons, gibiers et salades de pissenlits macérés dans des épices divines, tout le monde a grand faim, or Arthur déclare que le repas ne commencera pas avant que ne survienne quelque aventure. Arrive alors un messager qui présente au roi un manchon fabriqué en peau de teckel et qui se déforme sur le bras de la femme infidèle. Guenièvre de mauvaise humeur est en coulisse où elle n’en finit pas de se laver les mains. Arthur la fait quérir. Elle essaie en ronchonnant le manchon qui se rétracte. Gêne dans la salle. Pour faire diversion le roi décide de continuer l’essayage avec toutes les dames présentes. Le manchon en poil de Pépette se tortille en toutes sortes de positions sans jamais s’ajuster vraiment au bras d’aucune dame. Le messager repart alors non sans s’être excusé d’avoir dérangé la fête et le repas peut commencer.

Ils étaient tous assis et le silence s'était établi lorsque éclata un coup de tonnerre d'une force et d'une violence telles qu'il leur semblât que le château s'écroulait. Puis aussitôt apparut un rayon de soleil qui répandit dans la salle une éblouissante clarté. Tous ceux qui se trouvaient là furent comme illuminés par la grâce du Saint Esprit. Ils se regardèrent les uns les autres, se demandant ce qui avait bien pu se produire, mais tous restaient silencieux, incapables de dire un mot. Ils demeurèrent longtemps ainsi sans pouvoir parler, à se regarder comme des bêtes privées de parole. Alors apparut à l'intérieur de la salle le Saint-Graal que recouvrait une étoffe de soie blanche. Personne ne put voir qui le portait. Il entra par la grand-porte et aussitôt la salle fut emplie d'odeurs si suaves qu'il semblait que toutes les senteurs de la terre y avaient été répandues. Le Saint-Graal passa dans la salle en faisant le tour de chaque table et, chaque fois qu'il passait, apparaissaient à chaque place les mets que chacun désirait. Puis, quand tous furent servis, le Saint-Graal disparut. Nul ne put voir ce qu'il était devenu et où il était parti.

Perceval

Ce fut au temps qu’arbre fleurissent,
Herbes et bois et prés verdissent,
Et les oiseaux en leur latin
Chantent doucement au matin