“Accrochez-vous, je crois qu’on va dérailler“. On dirait que le train passe sur de grosses mottes de terre pleines de grumeaux et de cailloux. Secousses. Le train freine. S’arrête. Fumée. Nous allons voir à l’arrière, on aperçoit au loin comme un passage à niveau. De plus en plus de fumée. Des passagers commencent à sortir.
- Nous sommes arrêtés en pleine voie. Je vous demande de NE PAS PANIQUER. Y a-t-il des blessés, des gens qui se sentent traumatisés? - Ouais, c’est le contrôleur du 38 54.- Hein, hein, allo ? Ben je peux dire que c’est impressionnant: on a vu une boule de feu. - J’ai cru que c’était un camion citerne, qu’on n’allait pas en réchapper. - Y a le paysan qui est mort. - Le conducteur du train n’a rien. - Deux blessés légers.
- Ne paniquez pas, crie la jeune fille de la SNCF. Les secours vont arriver. Je vous demande de ne pas rester sur la voie. Je vous demande de remonter dans le train. Vous êtes sous notre responsabilité. Je vous demande de ne pas fumer. Le ballast n’est pas stable, mesdames, messieurs. Veuillez remonter.
- 13 pour Auray, Lorient, tu mets 40. Il y en a 1 pour Rennes. - Il faut féliciter le conducteur du train. - Le paysan du tracteur, il est comment ? - Mesdames messieurs, l’accident a occasionné des dégâts importants. Nous ne sommes pas en mesure de repartir. - Un des moteurs a explosé. Tu verrais le travail ! On a percuté un tracteur qui était sur la voie. - Va y avoir quoi ? - Vous prenez vos affaires, vous allez à la voiture 12. Nous allons dans une salle des fêtes. Nous sommes à quinze kilomètres de Pontchâteau. - Vous voulez que je prenne votre valise ? - Il n’a pas respecté le passage à niveau. - Est-ce que vous avez un portable ? vous pourriez me le prêter ?
- Madame, tournez-vous pour descendre: MADAME. Si, si, il faut vous tourner. Vous risquez de tomber.
- Allez-y. Ca a tendance à les énerver quand les gens font autre chose que ce qu’ils disent.
- Je t’explique la situation: on nous conduit dans une salle des fêtes... - Il a défoncé les barrières ? J’ai cru que tout allait exploser. - On est en train d’organiser des navettes sur Redon. A Redon il y aura un TGV.
- Est-ce qu’il y a des gens qui allaient à Rennes ? - Guimgamp. - Loudéac. - C’était un suicide ou quoi ? - Il parait qu'il y a un autre car qui va arriver. - La dame dit qu'elle ne peut pas supporter le car. Ni le taxi. Elle voudrait aller à l’hôtel. - Je suis capable de monter dans un car. Je ne peux pas beaucoup marcher mais ça je peux. - On va vous faire monter en premier, comme ça on mettra votre chaise à l’avant.
- Nous sommes à Dreffeac.
- Dreffeac ???
- Ne vous inquiétez pas, le TGV s’arrêtera à toutes les stations. - C’est un suicide, c’est ça ? - Donc, Michel, on est toujours à notre point de rassemblement, tu m’entends ? - La petite dame, elle demandait si c’est parce qu’elle était âgée qu’on la faisait monter en premier. Tu sais quel âge elle a ? 89 ans !
- Veuillez vous approcher. Les gendarmes vont prendre votre identité.
- Mesdames, je peux vous demander de me raconter ce qui s’est passé ? - Manon et Elise, c’est ça ?
- Nous, on étaient dans le dernier wagon. Moi j’ai vu du feu sur le côté, c’est tout.
- Je trouve que l’accident a été très bien géré par la SNCF.
- Et ensuite on nous a fait sortir.
- Vous avez ressenti un choc brutal ?
- Un choc brutal.
- Moi, j’étais dans le virage, je dois dire que j’ai pas trop vu ! Et où c’est qu’on va, à Redon ?